Affaire Ndiaga Diouf: Attention au syndrome Khalifa Sall ! Par Assane Samb

 

Le réquisitoire du Procureur durant le procès de l’affaire Ndiaga Diouf du nouveau maire de Dakar, Barthélémy Dias, ce mercredi, a été sévère. Cinq ans de prison, voilà ce que demande le Parquet. 

Rien d’étonnant si l’on suit la logique de l’Avocate générale. Car, elle a notamment retenu les « coups et blessures mortels, coups et blessures volontaires et détention d’arme illégale sans autorisation ». Car, si quelqu’un a une arme grâce à laquelle il inflige des coups volontaires à une autre personne même s’il n’y a pas intention de tuer et que par la suite, il y ait mort d’homme, on peut comprendre ce réquisitoire. Mais, rappelons que, dans notre système judiciaire, l’Avocat général qui représente le Parquet ne juge pas. Il demande une peine après avoir supervisé l’enquête judiciaire portant sur un prévenu ou accusé. Il appartient aux juges, ceux qui sont assis, à se prononcer. Et ces derniers le feront en toute indépendance, le 18 mai prochain.

Et, pour ce faire, les juges vont non seulement se baser sur les preuves apportées par l’accusation et le réquisitoire de l’Avocate générale, mais également sur les arguments de la défense et les éléments qui sont sortis du procès. Car, au pénal, les preuves sont certes importantes, mais tout dépend de l’intime conviction du juge ou des juges.

En tout état de cause, techniquement, le juge aura à voir s’il y a des causes de non-imputabilité ou des faits justificatifs, des circonstances atténuantes ou aggravantes, la légitime défense ou l’excuse de provocations, entre autres. C’est pourquoi, il est dommage d’entendre des réflexions du genre : Ils n’oseront pas le condamner à telle ou telle autre peine au regard du contexte politique et du fait qu’il soit Maire opposant de la capitale.

Même si ces considérations sont très importantes, nous ne pensons pas qu’elles soient des préoccupations pour les juges. Ces derniers auront à juger une personne, des faits et voir le lien de causalité entre la personne et les faits. Qu’importe la personne, ses responsabilités si nous sommes tous égaux devant la loi. C’est cela le principe. Mais, le réquisitoire de cinq ans rappelle tristement l’affaire de son prédécesseur à la Mairie de Dakar, Khalifa Sall.

Tout le monde a souvenance du fait que ce dernier a été condamné à cette peine et a été déchu subséquemment de son poste de Maire. Si Barthélémy Dias qui lui a succédé dans le cadre de sa coalition, vient ainsi recevoir une peine ferme d’emprisonnement de cinq ans, il sera déchu, lui aussi de son poste de Maire et devra retourner en prison pour le reste de sa peine. Ce qui n’est pas impossible car les articles L29 et L31 du Code électoral prévoient justement une telle déchéance.

Donc, si l’Avocate générale qui représente le Parquet et qui peut recevoir, hiérarchiquement des instructions du Ministère de la Justice, demande cinq ans de prison, cela fait penser, à juste titre, à beaucoup qu’il n’est pas impossible que les autorités étatiques soient dans une logique de liquidation politique.

Toutefois, comme mentionné supra, notre système judiciaire est ingénieusement articulé et permet aux différents acteurs du système de jouer pleinement leurs rôles en toute indépendance. Car, il n’est pas superflu de mentionner que les magistrats du siège ne reçoivent d’instructions de personne et qu’ils officient en toute liberté, loin des considérations politiques.

Malheureusement, dans cette affaire comme dans tant d’autres qui lui ressemblent, tout verdict sera apprécié par l’opinion publique, à l’aune des batailles politiques entre opposition et pouvoir. Mais, c’est là aussi toute la faiblesse du genre humain : On demande aux juges de juger pour les juger par la suite.

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